Contre-espionnage: Un rapport préliminaire CHARLES STANKIEVECH
Samedi 9 novembre 2013 à 13h00
Crédit image : Encounter Vol.1, Londres, 1953 ; Camouflage of Large Installations, Londres, 1939 ; Apéndice I, Barcelona, 1936. Collection: Stankievech
Dans le contexte du Programme Ciblé de SBC sur la souveraineté et de l’exposition Trevor Paglen, sur le drone et les enjeux liés à la sécurité, la galerie SBC invite l’artiste Charles Stankievech à présenter la recherche préliminaire qui servira à son projet d’exposition CounterIntelligence, ouvrant à la galerie Justina M. Barnicke (Toronto) en janvier 2014.
Durant la Seconde Guerre mondiale, Sir Anthony Blunt travailla pour le ministère du contre-espionnage du service de renseignement britannique, davantage connu sous le nom de MI5. Après la guerre, il fut sacré chevalier et on lui a offert plusieurs postes prestigieux, entre autres comme Inspecteur des tableaux du Roi, directeur du Courtauld Institute of Art et consultant pour le Musée des beaux-arts du Canada. Pour ce dernier, il fit l’acquisition d'un tableau de Poussin datant du XVIIe siècle et représentant Auguste et Cléopâtre. Toutefois dès les années 1970, des doutes fragilisèrent les identités de la toile de Poussin et du personnage public de Blunt commencèrent à se faire sentir. En 1971 tout d’abord, le Musée des beaux-arts du Canada révoqua l’attribution originale de la toile à Poussin, confirmée par Blunt, l’identifiant plutôt à un peintre italien inconnu – une décision qui n’a jamais été reconnue par Blunt, qui a maintenu jusqu’à la fin de sa vie sa première attribution à Poussin datant de 1938. La crise identitaire se consolida en 1978 lors de la déclaration parlementaire de la première ministre Margaret Thatcher qui révéla au public que Sir Blunt était un agent secret travaillant pour les soviétiques depuis le début de sa carrière comme historien de l’art à Cambridge, minant ainsi la légitimité de ses deux aptitudes au « renseignement ». Ce qui se présentait d’abord comme une histoire étonnante du monde de l’art a mis au jour un type de réseau secret rapprochant deux mondes parallèles.
CounterIntelligence s’intéresse aux recoupements entre les univers artistique et de contre-espionnage, abordés à partir d’exemples historiques allant des cellules de torture espagnoles ayant employé les esthétiques surréaliste et du Bauhaus dans les années 1930 à un livre d’artiste civil contournant les pratiques de décodage de l’Agence Nationale de Sécurité (NSA). Plutôt que d’emprunter la voie rebattue d’une étude de la propagande ou d’un questionnement du pouvoir de l’image, cette recherche explore les gestes cachés et les stratégies de tromperie utilisés par les forces de l’ombre. Elle s’attarde à un large éventail d’objets aussi différents que des artéfacts militaires historiques et des œuvres d’art canoniques. De façon stratégique, la conférence agit comme contrepoint aux manœuvres-de-contournement et œuvres-d’art-comme-messages-codés qui existent en parallèle, avec pour intention d’élargir le champ d’interprétation possible en proposant des échos poétiques entre les idées de sites secrets et non-sites, interrogation et installation, manuels militaires et livres d’artiste, leurre et readymade, etc. À la manière du camouflage, les apparences peuvent être trompeuses et, souvent, les interprétations superficielles peuvent porter à confusion lorsque les tactiques qui sont employées incluent des agents d’infiltration ou des mesures de « sécurité par l’obscurité ».
À propos de Charles Stankievech:
Charles Stankievech est un artiste canadien qui a donné des conférences, présentés des performances et exposé son travail internationalement, notamment lors de la dOCUMENTA13 (Kassel), au Haus des Kulturen der Welt (Berlin), au Palais de Tokyo (Paris), au Louisiana Museum of Modern Art (Copenhagues), au International Symposium on Electronic Arts (ISEA2010, Allemagne), à la 10e Biennale d’Architecture (Venise), au ISSUE Project Room (New York), au Musée d’art contemporain de Montréal, au Centre Canadien d’Architecture (Montréal) et au MASSMoCA. En tant que commissaire, il a organisé des expositions peu orthodoxes comme Les Nords magnétiques, A Wake For St. Kippenberger’s MetroNet et la série de projets OVER THE WIRE, avec entre autres Lawrence Weiner, Gary Hill, le Center for Land Use Interpretation et Shary Boyle.